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Lettre ouverte de plusieurs organisations de Droits Humains aux Autorités du Pays

Mesdames, Messieurs les Autorités de l’Etat,

Par la présente, nous signataires de cette lettre, représentants/tes des organisations membres du Collectif pour le Respect des Droits des Personnes Déplacées et pour la Promotion du Droit au Logement, tenons à vous exprimer notre plus vive inquiétude par rapport à une opération de déguerpissement forcé menée, conjointement par la Police et un groupe de civils armés, contre les déplacés du camp de la Place Jérémie, dans la nuit du 20 au 21 décembre 2011.


Nous signalons à votre attention plusieurs faits graves survenus lors de cette opération qui fondent notre inquiétude :

– Le déguerpissement a eu lieu au cours de la nuit à l’initiative d’un groupe de personnes armées bénéficiant de l’appui de la Police. Ces gens n’ont ni qualité, ni mandat pour réaliser de telles opérations, sur une place publique qui est patrimoine de l’Etat contre une population victime d’une grande catastrophe, en l’occurrence le séisme du 12 janvier 2010.

– Il n’y avait aucune décision judiciaire en ce qui concerne l’occupation de la Place Jérémie, aucun mandat n’a été émis conformément aux prescrits de la loi en la matière et aucun juge de Paix n’était sur place.

– L’opération a débuté au cours de la nuit, alors que selon la loi, les mandats ne peuvent être exécutés qu’entre six heures du matin et six heures du soir. La Police avait occupé les abords de la Place Jérémie depuis environ une heure du matin. Qui a donné l’ordre à la police de mener cette opération nocturne conjointement avec un groupe de civils armés ?

– La Mairie de Port-au-Prince déclare n’être pas concernée par l’opération. Selon des membres de l’AJPB (Association des Jeunes Progressiste du Bas Peu de Chose) qui ont mené l’opération, l’ordre de déguerpissement est venu directement du Palais National, plus précisément du Bureau de la Présidence de M. Martelly. Les « déguerpisseurs » avaient à leur disposition des enveloppes d’argent qu’ils disent provenir de la présidence et qu’ils ont distribuées comme ils le voulaient. Est-ce que le Palais National peut passer directement des ordres à la Police sans respect de la hiérarchie et des procédures légales ?

Nous estimons que la manière dont cette opération a été menée constitue un précédent dangereux qui ouvre la voie à toutes formes d’aventures, à des violations graves de droits humains et inaugure un retour au passé que le peuple haïtien avait rejeté.

Aussi, nous vous demandons, en tant qu’autorités de l’Etat, de prendre des mesures que de droit, chacun en ce qui le concerne, pour condamner cet acte, sanctionner les coupables et empêcher qu’il ne se répète.

Port-au-Prince, le 26 décembre 2011

Pour le Collectif,

Colette Lespinasse

GARR

Camille Chalmers

PAPDA

Reyneld Sanon

FAKKA

Antonal Mortimé

POHDH