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APE. Le score reste : initiés : 36 contre 40 ; signés: 19 contre 57

Le Bulletin de Cotonou N°32 – Les négociations des APE ressemblent parfois aux matches de « cricket » : la plupart du temps rien ne bouge. Ainsi le score des négociations commerciales n’a pas beaucoup évolué depuis fin décembre 2007, date butoir originale. Le score était alors de 35-41. Un an et demi plus tard, le score est de 36-40 et n’a plus bougé depuis que la Zambie a initié un accord intérimaire en septembre 2008.


76 pays ACP négocient des APE. Les Caraïbes (15 pays), ont conclu un accord complet fin de 2007 et 20 pays ont, au même moment, initié des accords intérimaires. La Zambie les a rejoint en 2008. 36 pays ont donc entrepris les démarches. Mais côté signatures, jusqu’à présent seuls 19 pays ACP ont signé les APE qu’ils avaient initiés : tous les Caraïbes sans Haïti, la Côte d’Ivoire, le Cameroun et, le 4 juin, le Botswana, le Lesotho et le Swaziland.

Entre temps le Parlement européen a donné son assentiment à l’APE régional avec les Caraïbes et à l’APE intérimaire avec la Côte d’Ivoire. Les socialistes avaient annoncé qu’ils refuseraient de voter pour un avis conforme si la Commission et le Conseil européen ne les as suraient pas d’une approche beaucoup plus flexible dans les négociations. Le 23 mars la Commissaire chargée du commerce, Mme Ashton, promettait d’être plus flexible et assurait « que les thèmes de Singapour (investissement, concurrence, marchés publiques, facilitation du commerce) ne seraient pas inclus dans les accords s’ils ne sont pas les bienvenus dans les pays ACP ». Or, ceux-ci ont déjà mille fois indiqué qu’ils ne sont pas intéressés à prendre des engagements de libéralisation dans ces domaines. Mais la Commission y revient sans cesse. Sans pousser dit-elle, mais en « essayant de convaincre les ACP que ces engagements sont dans leurs intérêts ». Quand acceptera-t-elle enfin le refus des ACP ? Dans son discours, Ashton n’a rien dit non plus des flexibilités fondamentales que les ACP de mandent en matière d’élimination de droits de douane, de services, sur la clause de la Nation la Plus Favorisée… Elle n’a pas non plus pris d’engagement formel à financier la mise en œuvre des APE, ou de revoir sans conditions les dispositions contestées dans les accords intérimaires. Malheureusement, pour la majorité des députés européens, les propos d’Ashton suffirent pour émettre un vote positif et ce, même pour l’accord intérimaire avec la Côte d’Ivoire dont aucun des contentieux n’a été révisé.

Et où vont les négociations des APE en Afrique de l’Ouest ? Les leaders politiques de cette région ont décidé récemment qu’ils ne sont pas prêts à conclure les négociations fin juin 2009 comme prévu. Ils restent sur leurs positions : 60% de libéralisation en 25 ans, limiter les chapitres sur les services et les thèmes de Singapour à de la coopération sans obligation de réguler ou de libéraliser, exigence d’un engagement formel de l’UE d’allouer 9,8 milliards d’€ au « programme (ouest- africain) de l’APE pour le développement » (PAPED). Or comme la position de la Commission sur ces questions reste trois fois négative, on ne voit pas comment en sortir.

Même absence de flexibilité d’ailleurs en Afrique australe. Après le départ de la Tanzanie pour rejoindre l’EAC (Afrique de l’Est), 5 des 7 pays restants ont initié un accord intérimaire : le Botswana, le Lesotho, le Swaziland,le Mozambique et (avec beaucoup des réserves formelles) la Namibie. L’Angola et l’Afrique du Sud, qui a déjà un accord de libre échange depuis 2000, ont refusé l’APE intérimaire. Depuis lors, la région, comme les autres, a exigé la révision de dispositions controversées dans l’accord intérimaire avant que celui ne puisse servir de base de négociations pour un accord régional et final. Début mars 2009 la Commission a accepté des compromis sur cinq des contentieux. Et elle insiste dès lors pour obtenir une signature même si plusieurs d’entre eux restent à résoudre. Le Botswana, le Lesotho et le Swaziland ont suivi la Commission, les autres pas. Et ainsi, à nouveau, les APE et la rigidité de la Commission ont mis en péril l’intégration régionale pourtant si nécessaire en Afrique.