Une exposition et une conférence-débats sont, entre autres, annoncées en vue de commémorer le 20e anniversaire (28 août 1994-28 août 2014) de l’asssassinat(vers 8:00 pm, à la rue Baussan, sous le régime putschiste du lieutenant-général Raoul Cédras) du père (catholique romain) montfortain haïtien Jean-Marie Vincent, dont les assassins courent encore.
Du jeudi 28 août au samedi 13 septembre 2014, une exposition se tient à la Fondation Connaissance et Liberté (Fokal) pour retracer, en images et en textes, le parcours du prêtre engagé, éducateur et entrepreneur social.
Le samedi 30 août 2014, la Fondation Jean-Marie Vincent (créée en 1995 par celles et ceux qui voulaient être sentinelles de sa mémoire) propose à Fokal une conférence-débat sur le parcours de Jean-Marie Vincent, dans les domaines de l’éducation, de l’environnement, de l’économie et de la politique, avec des intervenants comme l’ingénieur-agronome Yves-André Wainright, l’économiste Camille Chalmers et l’éducatrice Michèle Duvivier Pierre-Louis.
Pour se souvenir du prêtre assassiné, diverses activités ont lieu à l’échelle nationale et internationale.
« C’est une date importante, pour faire, non seulement un devoir de mémoire par rapport à cet acte d’assassinat (28 août 1994), mais aussi pour connaître et comprendre la qualité d’engagement, de leadership du père Jean-Marie Vincent durant toute sa vie », estime le professeur Camille Chalmers, interrogé par AlterPresse.
Vincent, que d’aucuns appelaient Janboul, a joué un rôle essentiel dans la dynamisation du mouvement social populaire haïtien, rappelle Chalmers, saluant la mémoire de cet illustre militant et homme religieux.
Le militant défunt aura réussi à marier, de façon harmonieuse, sa foi chrétienne avec son engagement social et politique.
« Le père Jean-Marie Vincent est un véritable manuel des temps modernes en Haïti, dans la mesure où il était obsédé par la question de l’eau (…) pour la culture paysanne ».
De 1971 à 1987, le père Jean-Marie Vincent a conduit un ensemble d’initiatives, notamment sur le plan organisationnel, dans le Nord-Ouest. Il a, ainsi, dirigé l’équipe missionnaire de Jean Rabel (constituée de militantes et militants autochtones et venant de l’extérieur), qui accompagnera la mise en place des gwoupman tèt ansanm (groupes communautaires de paysannes et paysans).
Ordonné prêtre le 8 janvier 1971, il est nommé vicaire en 1975 puis administrateur de la paroisse de Jean-Rabel de 1977 à 1983. De 1983 à 1991, il est directeur de la Caritas au Cap-Haïtien.
Il a permis la constitution de mouvements paysans très solides dans le Nord-Ouest, comme « Tèt ansanm » qui sera transformé plus tard en « Tèt kole ti peyizan ».
Il a contribué à la création du noyau organisationnel de cette structure, qui deviendra, plus tard, une fédération paysanne extrêmement combative.
Très actif dans un mouvement révolutionnaire en milieu populaire, il a joué un rôle extrêmement important dans la formation des mouvements populaires et sociaux en Haïti, ajoute Chalmers.
Outre les tentatives d’assassinats, de la part de grandon (grands propriétaires terriens du Nord-Ouest, en 1986 et 1987, Jean-Marie Vincent a eu un bras cassé et de graves blessures à la tête, à la suite d’un guet-apens militaire, perpétré le 23 août 1987 à Freycineau (à environ trois kilomètres au sud de Saint-Marc).
Jean-Marie Vincent revenait de Pont-Sondé où il a participé à une célébration, – en compagnie des prêtres catholiques romains Antoine Adrien, Jean-Bertrand Aristide et Willimam Smarth – à la mémoire des victimes du massacre de Jean-Rabel le 23 juillet 1987.
Il a conservé les cicatrices de l’attaque de Freycineau jusqu’à sa mort en août 1994.
Vincent a aussi contribué à la création de différentes structures d’accompagnement des organisations de base. Il voulait parvenir à la mise en place de structures économiques fortes, susceptibles de les soutenir.
En 1989 et 1991, il est initiateur et cofondateur du Fonds international de développement économique et social (Fides) et du Fonds haïtien de développement économique et social (Fonhades).
« Le père Jean-Marie Vincent était contre l’intervention des militaires américains pour soi-disant rétablir la démocratie en Haïti », affirme, pour sa part, l’un des anciens membres de la Fondation Jean-Marie Vincent, l’ingénieur-agronome Stephen William Phelps qui faisait partie de l’équipe missionnaire de Jean Rabel.
« Après enquête, une instruction était en cours sur l’assassinat du père Jean-Marie Vincent. Les gens inculpés étaient de hauts-gradés de l’armée ».
Jusqu’à présent, aucune justice n’est donnée à la famille victime du défunt.
Né le 21 octobre 1945 d’une famille de Baradères, Jean-Marie Vincent a été assassiné à l’âge de 48 ans (28 août 1994) par des hommes armés et des militaires devant la maison des Pères Montfortains, à la rue Baussan à Port-au-Prince.
Ses funérailles ont été chantées, le 2 septembre 1994, à la Congrégation des Montfortains.
Source: Alterpresse