Aller au contenu

Foire agro-écolo-touristique du 12 au 14 octobre 2007 à Jacmel

Le département du Sud Est a reçu du 12 au 14 octobre 2007 une grande foire Agro-ecolo touristique. Cet événement d’envergure dénote du dynamisme de nos paysans, de nos artisans de prouver que nous sommes capables de rompre avec le cercle vicieux de la dépendance qui passe prioritairement par l’assujettissement de notre économie soumise sous la coupe drastique de la dette, de l’aide alimentaire et du dumping. Les exposants qui ont pris part à cette grande manifestation- à cette foire, ont ravivé l’espoir par la signification de leur optimisme, par la qualité et la valeur des produits exposés qui sont malgré cela, réalisés dans des conditions où le producteur est livré à lui-même considérant l’absence de l’Etat.


On oublie trop souvent que notre pays malgré sa situation d’appauvrissement et de dépendance, représente toujours une terre d’espoir : notre agriculture, notre artisanat, notre élevage n’ont pas besoin de miracle pour se relever pour se redresser – ce qu’ils ont besoin c’est de la volonté de nos dirigeants de prendre des mesures à la taille des situations- rompre avec les politiques néolibérales dans le cadre des exigences du capital international en est un préalable. Nous avons jusqu’à présent une terre capable de nourrir ses enfants. Il faut la dynamiser-il n’y a pas d’autre choix possible- sinon d’aller dans cette direction, ou bien de signer la lettre de notre condamnation en hypothéquant notre avenir. Même si rares sont les dirigeants qui semblent en avoir pris conscience : la lutte pour la valorisation de la production nationale reste et demeure une revendication centrale.

Les produits agricoles qui ont décoré cette foire proviennent entièrement de l’agriculture paysanne du Sud-est. Les fruits et les légumes exhibés sur des tables d’exposition sont d’une fraîcheur exceptionnelle et d’une qualité sans conteste ; ils témoignent d’une longue tradition de culture reposée sur la fierté de la petite propriété qui a assuré pendant une bonne partie du dix-neuvième siècle la richesse nationale- même si cette dite richesse a été accaparée par des dirigeants sans scrupules. Les paysans résistent malgré la pérennité d’une telle politique. Les ignames, les haricots, le manioc et tous les produits agricoles exposés à cet effet constituaient un symbole de la résistance paysanne contre un Etat monté contre leurs intérêts. Comment des paysans sans encadrement, sans eau, sans subvention puissent continuer à produire au point que le secteur agricole représente jusqu’à aujourd’hui plus de 25% pour cent de contribution dans la richesse nationale ?

Au cours d’une conférence autour du thème : Souveraineté Alimentaire et Politique Economique, quelle perspective pour une Haïti Autonome et indépendante ; il a été démontré que le choix de nos dirigeants est orienté vers la satisfaction des Puissances Internationales au détriment des intérêts nationaux. La question de l’agriculture est reléguée au second plan, alors ce que réclament les paysans ce sont des changements en profondeur en vue de parvenir à une nouvelle situation.

Il y a lieu de miser sur notre agriculture, ce qui manque c’est l’apport des autorités étatiques, en ce sens un exposant à cette foire a eu la note juste en avançant :

« Si nous avions de l’encadrement technique, de crédit agricole disponible, nous pourrions faire des prodiges »

Les efforts déployés par les petits producteurs dans le domaine de la transformation ont été significatifs en ce qui concerne des produits comme des confitures, des gelées, des coquetels de fruits, etc. Le travail des organisations du Sud-est comme le VEDEK, l’APLADEM ont permis au public de savourer ou de se doter des produits qui recèlent une couleur locale à travers un goût particulier.

En plus de cette gamme de produits transformés, s’ajoutent des mets exquis qui ont traduit la diversité de nos plats. Notre tradition culinaire a été au rendez-vous en témoigne dans le menu la présence du griot et de la banane pesée, du ‘tyaka’, de la soupe de giraumon, du pain maïs, du pain patate, de l’ ‘akasan nan fèy’, etc.

Et l’atelier de transformation du VEDEK qui travaille sur des produits à base de manioc a enrichi la partie par la présentation aux fins de consommation de la cassave, du ‘bobori’ du ‘doukouno’ du bonbon amidon, et surtout des produits en expérimentation tels du gâteau, des pâtés, du pain avec de la farine mélangée (farine de blé + farine de manioc). Le tout a contribué à faire valoir ce que nous avons comme production et comme culture en Haïti.

En outre, les produits artisanaux faits avec des éléments de notre environnement ont longuement enseigné sur le savoir faire de nos ateliers. Nous avons décelé bien des talents qui méritent d’être encouragés et encadrés. Malheureusement, il n y a pas une politique gouvernementale digne de ce que nos artisans peuvent représenter sur le plan de la création de richesses pour notre économie. La foire a été un événement de promotion de notre culture.

En ce sens, ajoutons que la couverture musicale a été assurée par des groupes de la zone tels le B-ZU Compas de Cayes Jacmel, la Troupe Explosion de Jacmel, et tout aussi bien le Rara l’Union fait la Force de Cayes Jacmel et le Bal Kat Fleur de Jonc de Cap Rouge. La musique haïtienne a répondu à l’appel et le public a manifesté son engouement dans la circonstance.

La foire du 12 au 14 octobre dans le Sud-est a permis de voir de manière incontestable la richesse de notre production et il s’est avéré tout au cours de cet évènement, considérant le témoignage des participants, une nécessité qui consiste à réclamer une nouvelle politique économique qui donne la priorité à l’agriculture comme principal axe de développement national. La participation du public, la conférence présentée à cette occasion, brefs les revendications paysannes avaient comme leitmotiv la dénonciation des politiques mises en place par les gouvernements et les pressions internationales des grandes puissances. A ce titre, la libéralisation de l’économie haïtienne par l’affaiblissement spectaculaire des taxes à l’importation a été dénoncée comme mesure anti- populaire. Et dans la conjoncture actuelle, les pressions exercées par l’ Union Européenne pour la signature des Accords de Partenariat Economique (APE) étaient tout aussi considérées comme des mesures néolibérales visant à déstructurer davantage ce qui reste comme économie au niveau national. En synthèse les paysans, les artisans, les organisations présentes réclament :

– Une politique agricole répondant aux besoins nationaux
– Inscrire l’agriculture comme une priorité nationale en lui attribuant un budget approprié
-Réduire les importations massives de marchandises tout en développant une politique sectorielle agricole
-Augmenter les taxes à l’importation pour des produits agricoles.

Ainsi, la PAPDA et les autres organisations qui ont pris part à cette grande foire dans le Sud-est ne cessent de réitérer leur revendication en ce qui a trait à la définition d’une politique économique où le développement national est au centre des actions. Un plaidoyer pour un budget qui place le secteur agricole au cœur des préoccupations demeure la revendication fondamentale des paysans qui ont participé à cet événement.