La violence exercée contre les Peuples dominicains et haïtiens par l`attitude des 2 États continuent à tuer. La PAPDA exprime son indignation et sa profonde tristesse à l`occasion de l`inacceptable décès de 24 compatriotes haïtiens. Dans cet article le Père Regino Martinez nous communique son indignation et donne des pistes d`analyse des racines de cette tragique situation.
Dajabon, 13 janvier 2006. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas eu une volonté politique pour éviter ces accidents mortels, par l’établissement d’une véritable politique migratoire, légale et juste. Cette situation est en train de coûter un prix très élevé en termes de vies humaines, tandis que le trafic des migrants continue de bénéficier aux militaires et entrepreneurs, avec la complicité de la Direction Générale de la Migration.
La mort par asphyxie de 24 migrants haïtiens sans-papiers, décédés dans un fourgon à bord duquel ils voyageaient illégalement depuis Dajabon jusqu’à Santiago, en compagnie de 45 autres compatriotes, doit peser sur la conscience de quelqu’un. Assurément, sur celle de leurs sacrificateurs, membres du réseau de trafiquants haïtiens et dominicains qui touchèrent d’eux, 1500 à 2000 pesos par tête, pour ce tragique voyage de l’espoir. Mais aussi, leur mort doit peser sur ceux qui continuent de permettre que se passent de tels cas, en maintenant la République Dominicaine, sans une politique migratoire respectueuse de la dignité et des droits de la personne humaine.
Jusqu’à présent, le gouvernement a donné des réponses ponctuelles, irrationnelles et inefficaces contre le trafic de sans-papiers. L’actuelle Opération ‘Vaquero’, avec son déploiement de militaires et d’hélicoptères sur toute la frange frontalière dominico-haïtienne n’a pas pu freiner le phénomène, de même, inexplicablement, l’Opération Vaquero n’a pas pu retenir un fourgon rempli de migrants qui allaient tout droit vers la mort.
La frontière n’a pas besoin d’opération ‘ Vaquero ‘ : ici, nous ne sommes pas des vaches, nous sommes des êtres humains ! Nous n’avons pas besoin de rapatriements massifs ni de contrôles répressifs qui ne font autre chose que générer l’anarchie et des violations à la loi de la part d’une communauté accoutumée à la corruption des autorités étatiques.
La frontière et sa population ont besoin de LEGALITE : une loi migratoire ( et un règlement) qui s’ajuste à la Constitution dominicaine et qui crée une instance de contrôle frontalier transparente, respectueuse et spécialisée qui puisse compter sur les ressources humaines et techniques nécessaires.
Manque de volonté
Dans l’inévitable phase de transition vers la légalité, il faut que le gouvernement commence à agir avec un sentiment de justice et de réalisme face à la migration haïtienne et qu’il ne se fasse pas complice de la tragédie.
Le 18 décembre 2005, Solidaridad Fronteriza/SJRM avait décidé d’organiser
Le retour ordonné vers Haïti, pour les vacances de Noel, de 465 ouvriers qui travaillent dans les plantations agricoles de Cerro Gordo, à Valverde, avec lesquels nous avions travaillé deux ans, en les appuyant dans le processus difficile de régularisation de leur statut migratoire. Tous avaient été enregistrés par leur nom et celui de la plantation où ils étaient employés et les listes avaient été transmises aux bureaux de la Direction Générale de la Migration.
Le 5 janvier 2006, il était prévu leur retour à Cerro Gordo, mais l’actuel directeur de la Migration, Carlos Amarante Baret, n’a jamais répondu à la demande de ce groupe de migrants. Dans la pratique, avec cette attitude de censure, Amarante Baret a obligé un grand nombre d’ouvriers organisés, détenteurs d’un emploi sûr, dont l’identité est connue des entrepreneurs et des bureaux de la Migration, d’utiliser les voies légales pour entrer en République Dominicaine et revenir à leurs emplois. Encore, nous ne savons pas combien d’entre eux ont pu arriver à Cerro Gordo et combien se sont perdus sur les chemins dangereux de l’illégalité.
Alternatives vers la légalité
Si on veut réellement vaincre le trafic de personnes, il est nécessaire que, dans cette phase de transition, le gouvernement dominicain puisse permettre d’utiliser des formules alternatives qui se rapprochent le plus possible de la pleine légalité pour l’entrée de la main-d’œuvre étrangère.
Par exemple :
– En permettant que les membres des associations de migrants soient enregistrés dans les bureaux de la Direction Générale de la Migration à la frontière et puissent ainsi retourner à leurs emplois en République Dominicaine sans la nécessité de suivre les voies illégales ;
– En concédant que ce soit les propres patrons qui viennent chercher leurs employés jusqu’à la frontière, en présentant une liste de noms aux bureaux de la Migration, et éviter de cette manière, que les migrants aient à voyager illégalement au pays pour regagner leur lieu de travail.
– En accordant aux employeurs la possibilité de chercher de nouveaux employés par le biais de listes spécifiques disponibles dans les bureaux de migration haïtienne, et présentant les noms des personnes sélectionnées aux bureaux de la migration dominicaine pour leur faciliter la traversée de la frontière.
La bonne volonté est l’élément indispensable pour mettre en pratique ces propositions ou d’autres alternatives possibles pour résoudre le problème de trafics de personnes à la frontière. Les deux gouvernements haïtien et dominicain, ont une grave responsabilité dans la situation de crise actuelle. Pour cela, il est extrêmement urgent qu’ils commencent réellement à collaborer pour trouver une issue qui ne soit pas seulement des rapatriements massifs et des opérations ponctuelles de l’Armée, mais plutôt qui appelle au sentiment de légalité et de justice entre les deux nations. ( Fin de texte/Traduction GARR)
Pour authentification,
Colette Lespinasse
Coordonnatrice du GARR