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Justice Economique 5 (1997) – Editorial

Qui aurait cru en Juin dernier que l’année 1997 allait s’achever sur fond de crise qui a entraîné une vacance à la primature? Les plus perspicaces le présidaient déjà en arguant qu’aucun dossier n’allait pouvoir avancer puissque la Chambre Législative devait rentrer en vacance en Juillet 1997 puis rouvrir ses travaux en Janvier 1998. On ajoutait même qu’aucune solution politique n’allait être trouvée avant la nomintaion d’un nouvel ambassadeur américain en Haïti.


La scène politique est bien sur une estrade, loin de la rue. Les peuples semblent ne plus faire l’histoire, sauf qulques voix un peu sourdes, plus que jamais téléguidées… La réalité du pays a semblé se réduire à voter M. Hervé Denis dont le discours est désormais proche du néolibéralisme, au Rectorat de l’Université d’Etat ou à la Hcambre Législative. Les timides débats sur la décentralisation, la privatisation des entreprises publiques, les tarifs douaniers, la justice sont automatiquement éclipsés. Les hurlements voire les plaintes deviennent de plus en plus rares. Pourtant, la liquidation du pays se poursuit obstinément, les prix de certains produits de première nécessité tels les haricots, le rix… ont encore augmenté, de 10 à 25% à Port-au-Prince. Une bonne fraction de la population crève de faim pendant que les dirigeants proclament qu’ils ont assaini les finances du pays dans le discours inaugurant la nouvelle année, alors que le chômage, la mendicité deviennent de plus en plus patents.

Les périodes pré-carnavalesque et carnavalesque favoriseront la « déconnexion » traditionnelle utile. Mais, le discours officiel sera tout de même passé en dérision. « Pawòl Tafya » (Paroles d’ivrogne) entonnent « les sambas » de Boukman Eksperyans au rythme de leur méringue carnavalesque pour l’année 98. « A la moun yo mechan » (Que ces gens sont méchants!). Qui donc? Les « spécialistes » en détournement d’attention et en démobilisation populaire sans nul doute!

Quant aux « anciens militants » qui ne sont pas encore aspirés par la machine du pouvoir d’Etat, ils paraissent essoufflés et ont peur de se retrouver à la case de départ.

Mais, il faut bien que la lutte continue, que les ennemis aujourd’hui travestis, soient bien identifiés, que le discours révolutionnaire renaisse et se mette à la hauteur du temps pour démystifier le verbe démagogique ou creux sur l’anti-néolibéralisme d’où qu’il vienne et surtout pour dessiner les contours d’une alternative réelle et rebâtir la confiance du peuple en sa propre force.